Ressources

Les États ont l’obligation de protéger les personnes et les communautés des actions ou omissions d’entreprises qui pourraient violer leurs droits humains.

Worker

Entreprises et droits humains

Les États ont l’obligation de protéger les personnes et les communautés des actions ou omissions d’entreprises qui pourraient violer leurs droits humains. Les entreprises peuvent avoir des effets néfastes sur les droits humains de plusieurs façons : sur le lieu de travail, par ex. en n’accordant pas des conditions de travail décentes, au sein de la communauté, par ex. en polluant des sources d’eau, représentant ainsi une menace pour les vies et les moyens de subsistance, et dans nos vies privées, par ex. en recueillant des données personnelles sans le consentement des utilisateurs.

Les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme (PDNU) constituent le premier cadre international largement reconnu qui explique les responsabilités distinctes des États et des entreprises en matière d’effets sur les droits humains relatifs aux entreprises. Les PDNU ont été approuvés à l’unanimité par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies en juin 2011 et reposent sur les trois piliers complémentaires et interdépendants connus comme « protéger, respecter et réparer »:

  • Le devoir de l’État de protéger (pilier 1) – qui signifie que les États devraient adopter des mesures pour protéger contre les violations des droits humains commises par des tiers, y compris les entreprises, comme obligation au titre du droit international
  • La responsabilité des entreprises de respecter (pilier II) – qui signifie que les entreprises devraient respecter les droits humains et mener un processus de diligence raisonnable en matière de droits humains pour prévenir et empêcher des effets néfastes sur les droits humains comme norme relevant du droit souple
  • Accès à des voies de recours (pilier III) – qui signifie qu’il est attendu tant des États que des entreprises qu’ils assurent l’accès à des voies de recours effectives aux victimes de violations des droits humains relatives aux entreprises.

Mesurer le respect des droits humains par les entreprises

Cet outil a pour but d’apporter un soutien aux organisations pour qu’elles évaluent la mise en œuvre par l’État des piliers I et III des PDNU. Toutefois, pour une évaluation complète de la mise en œuvre des PDNU, il est tout aussi important d’évaluer la mesure dans laquelle les entreprises qui opèrent dans un pays donné respectent les droits humains et appliquent une diligence raisonnable en matière de droits humains, tel qu’identifié dans le pilier II des PDNU. Cette tâche peut être difficile, pour plusieurs raisons :

  • de nombreuses entreprises, en particulier des PME, ne publient pas du tout ou pas suffisamment d’informations permettant d’évaluer la qualité de leurs processus de diligence raisonnable en matière de droits humains et de nombreuses entreprises pourraient être réticentes à l’idée de collaborer avec des chercheurs à ce sujet
  • définir l’échantillon ou l’univers des entreprises à inclure dans une telle étude peut être ardu au vu du nombre important et de la diversité d’entreprises qui opèrent dans un pays
  • bien qu’ayant son siège dans un pays, une entreprise peut engendrer la plupart de ses effets négatifs sur les droits humains par ses activités dans d’autres pays ou dans sa chaîne d’approvisionnement multinationale, ce qui rend une évaluation complète de sa performance difficile.

Deux méthodes sont présentées ci-dessous, elles ont été employées pour collecter des données sur le respect des droits humains par les entreprises. Le prochain défi pour cet outil sera d’intégrer les données du pilier II dans son champ d’étude.

Corporate Human Rights Benchmark

Le Corporate Human Rights Benchmark (indicateur de référence des droits humains dans les entreprises - CHRB) est une méthode qui compare les politiques et la performance des entreprises par rapport aux attentes du deuxième pilier des PDNU et qui génère un classement des entreprises. Désormais intégré dans la World Benchmarking Alliance, l’élaboration du CHRB a été éclairée par les indicateurs des droits humains pour les entreprises de l’IDDH et se concentrait à l’origine sur les évaluations comparatives des plus grandes entreprises multinationales de la confection, des produits agricoles et des industries extractives, mais a désormais été élargi pour couvrir des secteurs supplémentaires. En 2020, le CHRB a évalué 230 entreprises mondiales de cinq secteurs à haut risque d’effets négatifs.

La méthode repose principalement sur une évaluation de la divulgation publique des données relatives aux droits humains par les entreprises concernées. La méthode complète couvre plus de 80 indicateurs répartis en 6 champs d’analyse :

  • gouvernance et politiques
  • intégration du respect et de la diligence raisonnable en matière de droits humains
  • voies de recours et mécanisme de plainte
  • performance : pratiques de l’entreprise en matière de droits humains
  • performance : réponses aux allégations graves
  • transparence

Une version abrégée (aperçus) du CHRB inclut une liste des principaux indicateurs (non spécifiques à un secteur) avec trois thèmes: engagements en matière de gouvernance et de politiques; intégration du respect et de la diligence raisonnable en matière de droits humains; voies de recours et mécanisme de plainte.

La version abrégée a été utilisée par des parties prenantes nationales pour effectuer une évaluation comparative de quelques-unes des plus grandes entreprises actives dans leur juridiction. Les aperçus nationaux peuvent fournir des indications utiles concernant le degré d’adoption de la diligence raisonnable en matière de droits humains par certaines des plus grandes entreprises nationales et créer un élan favorable à l’amélioration de la performance des entreprises. De plus, les résultats des aperçus peuvent être utilisés pour plaider en faveur de changements de politiques et réglementations. En Allemagne par exemple, l’aperçu du CHRB pour les plus grandes entreprises allemandes illustre clairement que les entreprises ne faisaient pas suffisamment preuve d’une diligence raisonnable en matière de droits humains, incitant le gouvernement allemand à entamer un débat sur une législation imposant un devoir de diligence en matière de droits humains, qui a finalement été promulguée en 2021.

Exemples d’aperçus nationaux :

Enquêtes pour les entreprises

Une autre approche pour mesurer la mise en œuvre du deuxième pilier a été l’élaboration d’enquêtes sur mesure pour les entreprises, généralement dans le cadre de l’élaboration d’une évaluation de référence nationale sur les entreprises et les droits humains et le suivi de la mise en œuvre des plans d’action nationaux.

Les enquêtes peuvent générer des données sur le niveau actuel de compréhension des droits humains par les entreprises, ainsi que leur mise en œuvre de la diligence raisonnable en matière de droits humains. Certaines des enquêtes élaborées incluaient également des questions au sujet des besoins et des priorités, dans lesquelles les entreprises pouvaient indiquer les domaines dans lesquels elles nécessitaient davantage d’informations et/ou un appui au renforcement des capacités.

L’avantage de l'approche par enquêtes est que les questions peuvent être adaptées aux réalités de chaque contexte national, afin d’assurer la collecte de données pertinentes et significatives. De plus, l’enquête peut également être un bon moyen de sensibiliser aux PDNU, en particulier dans les pays où l'adoption des questions relatives aux entreprises et aux droits humains est limitée. À la différence des évaluations comparatives qui visent à classer publiquement les entreprises, les analyses fondées sur des enquêtes ne nomment pas explicitement les entreprises, mais se concentrent sur la mise en évidence de tendances plus générales.

Exemples de rapports d’évaluation fondés sur des données collectées à partir d’enquêtes auprès d’entreprises :

Publication du l'Institute Danois des Droits de l'Homme: "An overview of national baseline assessments on business and human rights" (2023) (disponible uniquement en anglais)


Ce rapport est basé sur 31 évaluations de référence nationales sur les entreprises et les droits de l’Homme de 29 États, dont 25 étaient accessibles au public en février 2023. Des éléments de ce rapport sont également basés sur des entretiens avec des parties prenantes clés.

L’objectif de ce document est de fournir une vue d’ensemble des évaluations de référence sur les entreprises et les droits de l’Homme réalisées à ce jour. En outre, il met en évidence les considérations clés et les apprentissages pertinents pour les acteurs qui prévoient de commander et/ou de mener une étude de référence nationale. 

Actors which conducted the 31 NBAs
Publicly Available

 

Include Recommendations
Comissioned or independent initiative

 

Points clés à retenir

CHRB - INDICATEUR DE RÉFÉRENCE DES DROITS HUMAINS DANS LES ENTREPRISES

  • L’indicateur de référence se concentre généralement sur les plus grandes entreprises d’un pays
  • La méthode de l’indicateur de référence utilise des indicateurs directement éclairés par le deuxième pilier des PDNU
  • L’indicateur de référence repose sur les données transmises par les entreprises et disponibles publiquement
  • Le résultat final est un classement public des entreprises, ce qui peut être un bon outil pour motiver les entreprises dont la performance est mauvaise à commencer à s’améliorer

ENQUÊTE

  • L’enquête peut avoir une vaste portée
  • L’enquête peut être adaptée aux réalités du pays et être utilisée pour générer des données qui vont au-delà des attentes en matière de diligence raisonnable en matière de droits humains dans le deuxième pilier des PDNU
  • L’enquête peut générer de nouvelles données qui ne sont pas dans le domaine public
  • L’enquête repose sur des données fournies par des répondants dans les entreprises
  • Les réponses sont généralement anonymisées et agrégées pour saisir les tendances, n’exposant ainsi pas des entreprises spécifiques